Ca fait trente ans que je vais en vacances au même endroit en Corse. Je me baigne sur les mêmes plages, je mange les mêmes gambas et la même quantité d'ail à chaque fois. J'adore ça. Cette île a peuplé mon enfance d'immenses rochers, de poissons terrifiants et d'histoires interminables imaginées alors.
Crédule comme pas deux, ma famille m'a toujours fait croire à un tas de choses complètement absurdes. Ma soeur m'a par exemple fait croire que sa poupée favorite était vivante... Et tout simplement muette. Cette poupée me terrifia, elle hanta mes nuits jusqu'à ce qu'un jour, âgé de vingt-cinq ans, je retombe nez-à-nez avec elle dans le cagibi de ma mère. Enfer et damnation, elle est toujours vivante! fut la première chose qui me vint à l'esprit. Mais c'était sans compter sur le cartésianisme de mon esprit et l'expérience que j'ai acquise en matière de poupée: Il n'y a pas de poupées vivantes. J'ai ri à la figure de cette poupée malfaisante et suis sorti fièrement de cet étroit cagibi. En éteignant la lumière, j'ai tout de même ressenti une certaine culpabilité en me voyant la laisser seule dans le noir, ses grands yeux bleus ouverts, cherchant désespérément une âme d'enfant à distraire... Pour l'éternité.
Ma mère avait également le don de faire mousser ma crédulité.
Ma mère avait également le don de faire mousser ma crédulité.
Un jour de vacances, en revenant de la plage, nous sommes passés devant une petite maison. J'ai demandé pourquoi la porte était si petite et la serrure si basse.
Elle m'a répondu:
- Parce que ce sont des nains qui habitent là.
- DES NAINS! ON PEUT LES VOIR?, lui demandai-je, hystérique.
Nous sommes allés guigner comme nous pouvions entre les fissures séparant la porte et le mur. Rien. Mon cousin m'a pris sur ses épaules pour que je puisse voir entre les plantes entourant la maison. Toujours rien.
- Ils se cachent, assurai-je à ma mère.
- Oui, ils ne sortent que rarement et ils ne sont pas très gentils non plus.
- Ah bon!?
- Ils sont méchants.
- DES NAINS MECHANTS!
Je n'allais jamais m'en remettre.
Cet été, j'ai montré la maison des petits nains à mon amie, en lui racontant que je n'avais jamais réussi à les voir et que ma mère m'a dit un jour qu'ils étaient partis. Je lui ai avoué que même si je ne les avais jamais vus, je les imaginais bien. Très bien même.
Elle me fit remarquer cette agave devant leur porte.
Les agaves sont des plantes épineuses pas bien grandes qui produisent une fleur après 15 ans de vie. Mais quelle fleur! Une fleur de dix mètres de haut, épuisant tant l'agave qu'elle en meurt, laissant son pollen se répandre autour d'elle grâce à des chauves-souris, son animal pollinisateur. Une seule fleur en une vie. Comme une immense érection avant de mourir en pleine jouissance. Et tout ça devant chez les petits nains!
Le soir même, du sable collé partout sur les pieds et du sel sous le t-shirt, nous croisons mon oncle sur le petit parking qui borde notre maison. Je lui demande s'il sait ce que sont devenus les petits nains de l'Isolella.
Petit silence.
- Les petits nains? me demande-t-il.
- Oui les petits nains qui ont la maison au bord de la plage.
Mon oncle rigole un peu et enlève ses lunettes de soleil.
- Tu sais Romain, je crois que c'est ta mère qui les a inventés les petits nains. Ils n'ont jamais existé.
- Ah ouais... Bien sûr, c'est clair.
Je crois que je l'ai toujours su.
Mais j'ai préféré confondre le monde réel et celui de mon imagination plutôt que de vivre comme quelqu'un qui cherche sans cesse à connaître les trucs des magiciens. J'avais simplement envie d'y croire.
Plus tard, nous avons visité un cimetière marin. Il y avait ce caveau que des sangles enlacent pour l'empêcher d'exploser.
Il m'a fait penser à une agave qui se retient avant de propulser sa tige fleurie à dix mètres de haut.
Je ne sais pas pourquoi, sur la plage, j'ai eu le blues.
Je trouvais dingue le nombre de gens qui se baignaient là. Je me suis dit que chacun d'eux avait au moins une fois dû croire à des bobards étant jeune et que certains avaient encore envie de s'en prendre plein la gueule.
Elle m'a répondu:
- Parce que ce sont des nains qui habitent là.
- DES NAINS! ON PEUT LES VOIR?, lui demandai-je, hystérique.
Nous sommes allés guigner comme nous pouvions entre les fissures séparant la porte et le mur. Rien. Mon cousin m'a pris sur ses épaules pour que je puisse voir entre les plantes entourant la maison. Toujours rien.
- Ils se cachent, assurai-je à ma mère.
- Oui, ils ne sortent que rarement et ils ne sont pas très gentils non plus.
- Ah bon!?
- Ils sont méchants.
- DES NAINS MECHANTS!
Je n'allais jamais m'en remettre.
Cet été, j'ai montré la maison des petits nains à mon amie, en lui racontant que je n'avais jamais réussi à les voir et que ma mère m'a dit un jour qu'ils étaient partis. Je lui ai avoué que même si je ne les avais jamais vus, je les imaginais bien. Très bien même.
Elle me fit remarquer cette agave devant leur porte.
Les agaves sont des plantes épineuses pas bien grandes qui produisent une fleur après 15 ans de vie. Mais quelle fleur! Une fleur de dix mètres de haut, épuisant tant l'agave qu'elle en meurt, laissant son pollen se répandre autour d'elle grâce à des chauves-souris, son animal pollinisateur. Une seule fleur en une vie. Comme une immense érection avant de mourir en pleine jouissance. Et tout ça devant chez les petits nains!
Le soir même, du sable collé partout sur les pieds et du sel sous le t-shirt, nous croisons mon oncle sur le petit parking qui borde notre maison. Je lui demande s'il sait ce que sont devenus les petits nains de l'Isolella.
Petit silence.
- Les petits nains? me demande-t-il.
- Oui les petits nains qui ont la maison au bord de la plage.
Mon oncle rigole un peu et enlève ses lunettes de soleil.
- Tu sais Romain, je crois que c'est ta mère qui les a inventés les petits nains. Ils n'ont jamais existé.
- Ah ouais... Bien sûr, c'est clair.
Je crois que je l'ai toujours su.
Mais j'ai préféré confondre le monde réel et celui de mon imagination plutôt que de vivre comme quelqu'un qui cherche sans cesse à connaître les trucs des magiciens. J'avais simplement envie d'y croire.
Plus tard, nous avons visité un cimetière marin. Il y avait ce caveau que des sangles enlacent pour l'empêcher d'exploser.
Il m'a fait penser à une agave qui se retient avant de propulser sa tige fleurie à dix mètres de haut.
Je ne sais pas pourquoi, sur la plage, j'ai eu le blues.
Je trouvais dingue le nombre de gens qui se baignaient là. Je me suis dit que chacun d'eux avait au moins une fois dû croire à des bobards étant jeune et que certains avaient encore envie de s'en prendre plein la gueule.
1 commentaire:
j'adore l'histoire des nains...et que tu te sentes coupable de laisser la poupée toute seule :D
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